Discours du maire à la Conférence Internationale du Transport de Moscou
Je viens d’une ville de cheminots….
Monsieur le maire de Moscou,
Permettez-moi de vous remercier pour votre invitation au nom de notre Conseil municipal et des populations de la ville de Thiès. Notre participation à ce Sommet International du Transport de Moscou renforce les liens déjà solides entre le Sénégal et la Russie. Je dois rappeler que Thiès et Sébastopol ont signé une convention de partenariat sur plusieurs domaines qui touchent la science, l’aménagement du territoire, la santé, les échanges culturels, commerciaux et économiques. Dans ce cadre, une délégation de Thiès a déjà séjourné à Sébastopol et nous avons eu l’honneur de recevoir la délégation de Sébastopol dans notre ville au Sénégal.
Cette belle coopération commence à donner des résultats. Pour la prochaine rentrée universitaire, des étudiants de Thiès viendront poursuivre leurs études en Russie. C’est le lieu pour moi, de remercier l’ambassadeur de la Russie à Dakar pour le rôle joué dans le rapprochement de nos villes et de nos peuples. Le Sénégal et la Russie se sont engagés à bâtir une nouvelle coopération qui repose sur le respect de la dignité, la personnalité et la souveraineté de chaque peuple. Le Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye et le Président Vladimir Poutine ont eu récemment un entretien téléphonique pour réaffirmer leur engagement à travailler ensemble pour un nouvel équilibre dans les relations internationales. Monsieur le maire de Moscou, merci de transmettre au gouvernement de Sébastopol, notre disponibilité entière à poursuivre et à renforcer la coopération entre nos deux villes.
Je viens de Thiès, la ville aux deux gares, un peuple de cheminots dont l’histoire a été façonnée par le train. La solidarité et la passion sont caractéristiques de l’esprit du cheminot. Dans l’histoire du Sénégal, les cheminots de Thiès ont été de grands résistants et ont joué un rôle de premier plan dans les luttes d’indépendance des pays africains.
Ainsi vous comprendrez aisément que pour ce présent Sommet International de Transport, j’ai choisi de parler du ferroviaire. Parce que la ville de Thiès a été façonnée géographiquement, socialement et culturellement par le chemin de fer. Jusqu’au début du XIXe, Thiès était un petit village qui avait même été brûlé par le pouvoir colonial le 12 mai 1862. Mais l’ouverture de la ligne du chemin de fer Dakar-Saint-Louis en 1885, de la ligne Thiès-Bamako en 1907, de Thiès-Niger en 1924 et l’implantation de la direction unique de la compagnie de gestion à Thiès ont donné une dimension fulgurante à notre ville.
Aujourd’hui, Thiès située à 70 km de la capitale, est la deuxième ville du Sénégal avec 500 000 habitants ; elle est devenue une ville universitaire, une ville aéroportuaire (à 30 km de l’aéroport international Blaise Diagne), une ville minière (la première région minière du Sénégal), une ville culturelle, une ville cosmopolite qui accueille plusieurs nationalités. C’est pourquoi, nous nous sommes engagés auprès du Président de la République pour la relance des activités du chemin de fer. Cette relance est vitale pour le développement économique et social de notre pays.
Monsieur le maire, chers participants et chers partenaires,
Le chemin de fer constitue, à n’en point douter, un facteur déterminant d’expansion économique. Notre ambition est claire : faire de Thiès la capitale industrielle du Sénégal. Cet objectif, stratégique pour notre pays, ne saurait se concrétiser sans la réhabilitation et la modernisation de notre réseau ferroviaire.
En effet, il ne peut y avoir d’industrialisation durable sans un chemin de fer moderne, capable d’assurer efficacement le transport des personnes, des marchandises mais surtout des matières premières et des produits issus de nos industries. Thiès, première région minière du Sénégal, abrite des pôles industriels majeurs : les Industries Chimiques du Sénégal (ICS), la Grande Côte Opérations (GCO) spécialisée dans l’exploitation du zircon, les phosphates de Lam-Lam, ainsi que les cimenteries Dangote et du Sahel entre autres... Ces infrastructures industrielles génèrent chaque jour des flux considérables qu’il est impératif d’acheminer dans les meilleures conditions.
Le chemin de fer apparaît ainsi comme un levier incontournable pour renforcer la compétitivité de nos industries, désenclaver nos zones minières et soutenir la dynamique de transformation économique. Le développement de l’Afrique, Mesdames et Messieurs, ne pourra se faire sans un système de transport moderne, fiable et adapté aux enjeux de notre époque.
Au-delà de son rôle économique et industriel, la relance du chemin de fer sera également une source importante de création d’emplois. Des milliers d’emplois directs verront le jour dans la construction, la maintenance et l’exploitation du réseau ferroviaire. À cela s’ajoutent les emplois indirects générés dans les secteurs connexes tels que la logistique, le commerce, les services et le développement des petites et moyennes entreprises. Le chemin de fer, en plus de renforcer notre compétitivité industrielle, constituera ainsi un puissant levier de lutte contre le chômage et de promotion de l’inclusion sociale.
C’est pourquoi, nous pouvons dire que le chemin de fer est au carrefour de multiples enjeux politiques et économiques, géographiques, diplomatiques et écologiques.
Ensuite, le chemin de fer participe à l’intégration nationale, sous-régionale et africaine. Ainsi, nous soutenons fortement le projet de réhabilitation de Dakar-Bamako. Nous voulons même retrouver la ligne de Thiès- Niger et de nouvelles lignes qui nous mènerons à Abidjan, à Ouagadougou et vers d’autres villes et capitales africaines. Les Africains doivent pouvoir voyager et faire leurs échanges par le chemin de fer. Le train rapproche les villes et les peuples. Dans nos pays où le transport aérien à l’intérieur n’est pas trop développé, l’alternative ferroviaire reste la plus crédible. Nous pouvons en faire le moyen de transport le plus attractif de notre continent. C’est pour cette raison que le Sénégal doit redevenir un hub ferroviaire en Afrique de l’Ouest. Par conséquent, le chemin de fer est un instrument diplomatique et stratégique très efficace pour un État stratège.
En plus, le chemin de fer demeure le moyen de transport terrestre le plus sûr, parce qu’il diminue les accidents et participe à la protection des routes dont la longévité est menacée dangereusement par les camions gros porteurs. Par ailleurs, le train conserve un avantage indéniable sur ses concurrents en matière écologique : il se révèle généralement moins polluant que la voiture ou l’avion, et s’inscrit de ce fait dans une démarche plus respectueuse de l’environnement.
Le train ne se limite pas à ses avantages en matière de sécurité et d’écologie ; il constitue également un mode de transport qui allie confort et utilité sociale. Contrairement à d’autres moyens de déplacement souvent contraignants, il offre un cadre de voyage plus serein, favorable au repos comme au travail. De plus, il demeure un instrument essentiel de mobilité inclusive, reliant efficacement les territoires, facilitant les échanges et contribuant à l’égalité d’accès aux services. À ce titre, le rail apparaît non seulement comme un outil de transport, mais aussi comme un vecteur de cohésion et de développement durable.
Chers partenaires, nous vous invitons à soutenir à l’effort national du Sénégal en faveur de la réhabilitation du chemin de fer afin de redonner vie au train à Thiès, au Sénégal et dans la sous-région ouest-africaine. Cet engagement constituera un pas décisif vers le décollage économique de notre pays et la construction d’une Afrique nouvelle, dynamique et prospère.
Je vous remercie pour votre attention.

Babacar Diop, Maire de la ville de Thiès
Moscou, le 21 août 2025
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